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Changement et apprentissage
lundi 28 septembre 2020
La période que nous venons de vivre et continuons à vivre nous rappelle à quel point le changement est inhérent à la nature humaine et, de façon plus générale, est une des caractéristiques essentielles du vivant. Un vieux proverbe ne dit-il pas : « On ne se baigne jamais deux fois dans la même eau ».
Du point de vue étude et théorisation, la gestion du changement peut être considérée comme une discipline assez récente, et cela n’engage que moi. Je distinguerai deux grands axes de recherche :
- Le changement individuel et le changement collectif, essentiellement dans le milieu de l’entreprise.
- Il est important de bien comprendre les mécanismes du changement à titre individuel avant d’aborder la conduite du changement au niveau d’un collectif.
En ce qui concerne le changement dans le milieu de l’entreprise, qui ne fait pas l’objet de cet article, John P. Kotter peut être considéré comme une des références. Ses livres les plus célèbres, que je vous encourage à lire, sont : Leading change (1996), Alerte sur la banquise (2008) et Conduire le changement (2015).
Dans le domaine du changement individuel, l’école de Palo Alto et le MRI dans les années 1960 (Mental Research Institute, aussi localisé à Palo Alto) font figure de référence. Leurs apports, enrichis depuis par les neuro-sciences sur le fonctionnement du cerveau, sont considérables et toujours d’actualité.
Pour les chercheurs du MRI, plusieurs notions sont essentielles dans le changement individuel dont les deux ci-dessous :
- La notion de changement est indissociable de celle d’apprentissage
- Il n’y a pas de changement sans processus émotionnel
Dans cet article, je ne développerai que la première : La notion de changement est indissociable de celle d’apprentissage, car cet aspect est trop souvent négligé dans l’accompagnement du changement en entreprise.
Les neuro-sciences l’ont montré, notre cerveau est un grand fainéant qui ne cherche qu’à s’économiser, ce qui se traduit par le fait que face à un problème nouveau, il va d’abord chercher à répliquer des schémas qu’il connait, avant éventuellement d’envisager d’autres manières de procéder. Le fonctionnement du cerveau est régi par 5 grandes lois :
La loi de similitude : le cerveau va chercher à regrouper les éléments ayant des caractéristiques communes : ex dans le dessin ci-dessous, votre cerveau va différencier très rapidement les X des U, et il vous faudra très peu de temps pour dire le nombre de X ou de U

La loi de proximité : Notre cerveau va relier entre eux des éléments proches (ex : les constellations dans le ciel : la grande ourse, le W de Cassiopée).

La loi de clôture : le cerveau a une tendance naturelle à considérer des formes fermées.
Question : combien y a-t-il de triangles dans le dessin ci-dessous ?

Notez bien l’importance de la formulation de la question : « Combien y a-t-il de triangles ? » et non pas « combien voyez vous de triangles ? »
La réponse est : Aucun triangle ou une infinité. Un triangle est défini par trois cotés. Soit les côtés sont noirs et il n’y a aucun triangle, soit les côtés sont blancs et il y a alors une infinité de triangles.
La loi de signification : le cerveau procède par analogie(s) avec des éléments qu’il connait et a en stock.

La loi d’influence ou de contexte : Si un groupe de données ne fait pas sens, c’est celui de son contexte et de son environnement qui prévaudra.
La série de nombres : 2, 89, 41, 17 n’évoquera peut être rien pour vous de prime abord.
Maintenant si je vous dis qu’il y a un lien logique entre ces 4 nombres, vous allez passer un peu de temps et finirez par trouver que ce sont tous des nombres premiers
A ces 5 lois, je rajouterai le fait que le cerveau ne sait pas appréhender visuellement 2 choses à la fois. Que voyez vous dans l’image ci-dessous ? : un couple de personnes âgées, une coupe, un guitariste avec un chapeau mexicain et une femme qui claque les doigts avec les bras au niveau de la tête, une jeune femme sortant d’une pièce.

Il nous est impossible de dire : je vois tout cela simultanément.
De tout ce qui précède, nous voyons que le cerveau procède selon des schémas pré-établis, qui sont propres à chacun de nous. Deux personnes placées dans un même environnement ne vont pas sélectionner et mémoriser les mêmes éléments :
- Différence de perception selon que l’on est visuel, auditif, kinesthésique, … ;
- Influence de nos valeurs : familiales, groupe d’appartenance, culturelles ;
- Formes, connaissances déjà enregistrées dans notre cerveau et donc connues de lui ;
- …
Il s’ensuit que, face à un même changement, deux personnes vont réagir de façon différente. Pour certaines personnes, le changement va consister simplement en un nouvel apprentissage, alors que pour d’autres il sera nécessaire de déconstruire un ou plusieurs méta-programme (en d’autres termes de désapprendre) avant de pouvoir apprendre quelque chose de nouveau.
A titre d’exemples :
- On ne démarre pas une Formule 1 de la même manière qu’une voiture ordinaire. Il va donc falloir apprendre de nouvelles sensations, schémas bien que les deux soient des voitures.
- Les soldes sont un moyen de gagner de l’argent. Il serait plus correct de dire d’en dépenser moins.
Il s’agit donc, quand on veut initier un changement dans un environnement collectif, de poser un diagnostic le plus précis possible sur ce qu’il sera nécessaire de faire, en matière d’apprentissage avec chacune des personnes concernées :
- Soit juste un apprentissage : acquérir de nouvelles connaissances.
- Soit commencer par désapprendre pour être capable d’en apprendre de nouvelles.
Pour conclure :
- La notion de changement est intrinsèquement liée à celle d’apprentissage.
- Nous sommes tous différents, et de ce fait l’accompagnement au changement devra être individualisé pour prendre en compte cette dimension apprentissage / désapprentissage.
Photo by Chris Lawton on Unsplash
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